Se réjouir

Se réjouir ...

Philosophie heureuse, philosophie pratique à la portée de chacun/chacune.

Parce que toute existence est zébrée de noir et qu’elle cache, de l’enfance à la mort, tant de plaies, tant d’abcès, tant de traits à la pointe d’un insidieux fusain.

 

C’est Talleyrand, je crois, qui disait qu' « il n’y a pas de grand homme pour son valet de chambre » ... Plus simplement, puisque les valets ont disparu, disons qu’il n’y a pas de grand homme face à lui-même, dans sa chambre, surtout lorsqu’il se sent malade, du corps ou de l’âme ... ce qui est le cas de la grande majorité.

 

Se réjouir ... c’est l’antidote.

Cultiver les petits plaisirs ou savoir les créer. Pas besoin de posséder des millions pour dresser une table surmontée d’une fleur et auréolée de bougies. Pour réunir des amis qu’on n’a pas vus depuis longtemps et les écouter. Pour faire une bonne partie de cartes où même les perdants sont contents ! Pour choisir, à la télévision, une émission ou un feuilleton absorbant. Pour assister, toujours par écran interposé, à un beau match. Pour rejoindre, au chevet, un livre préféré. Pour astiquer, à la rentrée, sa maison qui en a bien besoin et respirer, gaiement, sa bonne odeur de cire.

 

Se réjouir ...

Du sourire d’un passant inconnu. Des mots gentils de quelqu’un qui vous a reconnu. Du voisin qui vous donne un coup de main. Pour compléter les 4 sous d’un gosse dans un kiosque. Du napperon propre au fond du vieux corbillon ...

Se réjouir de tous ces petits plaisirs ...

Une carte bronzée d’une île à découvrir. Passer en revue les bonnes années avec les témoins de ce passé. Se reconnaître « parents » des gens qui viennent d’arriver.

 

Se réjouir ...

Des joies de toute saison (je vous le dis parce que j’ai en horreur l’hiver !), mais savoir que l’automne est encore l’été alangui. Et que l’on retrouvera le soleil dans les raisins de Lavaux ... S’émerveiller des paysages, les humer, les savourer. S’en repaître, comme on fait provision de bois, de forces.

 

Se réjouir ...

Quand on a eu très mal, qu’avec le temps, on souffre moins. Et que les cous ridés des femmes mûres ont le mérite de cacher leurs cicatrices ...

 

Se réjouir ...

D’affiner un progrès, de modeler des formes ou de former des modèles ! A l’heure de la retraite, alterner siestes et projets. On ne vieillit que lorsqu’on n’a plus de goût à rien : pour cela, pas d’âge ... regardez certains jeunes !

La réalité est triste ? Elle l’a toujours été. Elle est injuste : à travers les temps, elle l’a toujours été.

Le monde va mal ? Il ne s’est jamais bien porté ...

On n’a plus d’avenir ; si, puisqu’on a un passé et un présent dont on devrait se réjouir. A nous de mettre des fêtes, là où il y a de la morosité : fêtes de coeur, de la convivialité. Il faut plus de courage aujourd’hui (comme hier) pour s’amuser que pour se lamenter. S’amuser, non à Versailles, mais chez soi ouvert aux autres : inventer des plages de récréation/recréation.

 

Nous avons besoin les uns des autres : s’isoler, se retrancher, critiquer sans louer, c’est ça la mort.

 

Se vouloir vivant ... et s’en réjouir ! 

(Marie-Claude Leburgue)