Le petit monde d'Alice

vendredi 12 juillet 2013

Publié par Alice - 1 commentaire

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Chez Petit-furet, les hommes sont pêcheurs de père en fils, depuis des générations. Et le soir à la veillée, les grands-pères racontent aux enfants la légende de l’amphigourig. Une sorte de géant, d’ogre qui vit au fond des mers et que nul ne voit jamais. Un jour, il y a de cela des siècles, un ancêtre Furet a trouvé un amphigourig échoué sur la plage. Au lieu de le dépecer, il a fait venir toute la famille pour le remettre à l’eau.


"S’il vous arrive d’en remonter un au bout de votre ligne, faudra pas avoir peur, avait conclu le grand-père. Il y a un pacte d’amitié entre eux et nous, les Furets !"

Ne pas avoir peur. Petit-Furet aimerait bien que son grand-père soit là ! Parce qu’un amphigourig, c’est plus qu’impressionnant !
Imaginez : une énorme tête couverte d’écailles vertes et bleues, des grands yeux noirs et une sorte d’antenne flexible au sommet du crâne … Dans l’eau transparente, Petit-Furet devine des nageoires, mais aussi comme des milliers de pattes qui s’agitent. L’amphigourig, ça tient du dragon, du serpent de mer, de la pieuvre et du scolopendre géant. Bref, c’est indescriptible !


Petit-Furet fait face à la bête. Celle-ci a posé délicatement les premières rangées de ses pattes à ventouses sur le bord du canot et dévisage le garçon de ses yeux sombres.

- Je m’appelle Petit-Furet, de la famille Furet, tu sais … balbutie l’enfant. On a signé un pacte d’amitié toi et nous !


L’amphigourig remue sa tête fantastique, comme s’il comprenait. Son antenne frontale, semblable à un bouquet, s’incline vers Petit-Furet et le caresse. Le garçon n’a plus peur du tout. Et pourtant, d’un seul coup de sa formidable mâchoire, l’animal pourrait les engloutir, son bateau et lui …


La mer alentour est parfaitement lisse, tel un lac par une eau soir d’été. Nul bruit, nul voile, le ciel est comme figé. Et cela dure, dure. Combien de temps au juste ? Dix minutes, deux heures, ou plus … Et puis, brusquement, l’amphigourig ouvre toute grande sa gueule prodigieuse. Il se contracte, régurgite le peau-bleue et le pousse vers le bateau. Petit-Furet amarre le grand poisson le long de la coque.
Une dernière fois, l’amphigourig fixe Petit-Furet, et, doucement, tout doucement, il s’enfonce dans les flots. Petit-Furet se sent soudain bien seul.

Il finit par rentrer chez lui, remorquant son énorme prise. Tous les gens du port sont là et le regardent arriver, s’extasiant qu’un si petit garçon ait pris un si gros poisson !

Quand on ouvre le ventre du peau-bleue, on trouve la raie-manta, puis le congre géant, puis la roussette, puis la vieille et enfin, le petit éperlan brillant, tout ce beau monde dans un remarquable état de fraîcheur.


- Jamais, non jamais on a vu ça ! murmurent les pêcheurs.


Petit-Furet pourrait leur dire la vérité, leur parler de l’amphigourig. Pourtant, il se tait. "L’heure n’est pas venue", pense-t-il.

Plus tard, bien plus tard, lorsqu’il sera vieux et que ses petits enfants grimperont sur ses genoux, peut-être à son tour racontera-t-il l’histoire de l’animal fabuleux, de celui que l’on appelle "l’ogre des mers", et qui protége la famille Furet depuis le début des temps !

(Yvon Mauffret, L’ogre des mers, Editions Hatier-La courte échelle)

http://img4.hostingpics.net/pics/894295poisson2.jpg

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