Le petit monde d'Alice

mercredi 8 janvier 2020

Surtout, j’ai lutté, je vous jure, lutté de toutes mes forces contre mon défaut majeur que vous avez déjà, oh ma honte ! remarqué : ma passion pour les parenthèses.
Chères parenthèses qui permettent d’intercaler dans la phrase des précisions, des explications, des remarques personnelles !
Mes professeurs m’ont dit, et répété, qu’elles ne sont pas essentielles au sens, qu’elles ralentissent le rythme, qu’elles alourdissent le texte...
Je suis une fille intelligente. Je comprends ces arguments. Alors pourquoi m’obstiné-je dans ma maladie ? Vais-je continuer longtemps à truffer mes écrits de parenthèses ?
Je vais vous répondre.
Car j’ai réfléchi.
Comment expliquer mon étrange amour pour les parenthèses ?
Trois raisons me sont venues.
1. J’ai besoin d’îles. Sans les îles, la mer s’ennuie. Les parenthèses sont des îles dans la phrase, dans le texte.
2. Je suis une prof. J’ai l’enseignement dans l’âme. Les parenthèses permettent d’expliquer.
3. J’ai beaucoup de mal à ne raconter qu’une seule histoire en même temps. Protégée par les parenthèses, une deuxième petite histoire peut être à l’intérieur de l’histoire principale.
De tout cela, je déduis que, malgré tous mes efforts et selon toute probabilité, je continuerai à trop, beaucoup trop employer mes chères amies parenthèses.
(Erik Orsenna, Et si on dansait ?)


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