Une tornade passe à travers la maison. Bruits d'avions, tirs de mitraillettes, cris déchirants... Tout va bien. Ce sont mes cinq garçons ! On est samedi. Moi, je m'installe avec mon café dans un coin du canapé... et je lis. [...] Seule femme dans cette maison de mâles.
Chut, les enfants, c'est mon "moment de femme" ! Un temps où je ne suis ni mère, ni épouse, ni ménagère, ni écrivain, ou peut-être tout cela à la fois, réunis dans ce qui est premier chez moi : je suis d'abord une femme.
Il me faut d'abord du silence... Ah ! Oui, du silence ! Pour retrouver le chemin de mes pensées et pouvoir les suivre quelque temps, sans compter, sans les juger ni les arrêter. Il me faut de la douceur ; une bonne odeur de bougie pour flatter mes sens. Un bon coussin pour que mon corps puisse se délasser. "N'oublie pas de prendre soin de moi", me rappelle-t-il tout bas. Il me faut de la chaleur. Un plaid ou un poncho car j'ai vraiment horreur d'avoir froid. Et le comble du bonheur, un feu dans la cheminée, que je regarde danser. Je m'évade.... Je suis bien. Le long des flammes, je retrouve mon coeur de femme.
Alors un monde s'ouvre à l'intérieur de moi. Toute une vie cachée, trop souvent mise de côté. Des mots, des phrases, des pensées prospèrent et s'épanouissent. Mon esprit affamé cherche de quoi se nourrir. Je reprends mon journal, le feuillette. Tout m'intéresse, je furète. Un dossier, une expo, une critique de livre attirent mon attention. Je me sens des envies de grandes conversations. "Tu as vu, chéri ?" Je dérange mon mari. Il sourit. Nous parlons. Je me rappelle avec raison que la femme est toute relation. Après le silence ressourçant, voilà que j'ai besoin d'échanges, de paroles, de pouvoir donner mon avis. J'ai besoin d'être dans la vie !
Tout à coup, la porte s'ouvre. Un, deux, trois grands gars déboulent, inoccupés, les jambes trop longues avec un visage de bébé. "Maman, maman..." Venez, je suis prête. La femme en moi que je viens de retrouver est disponible pour... aimer.
(Gaëlle de France)
Source : "Aime et fais ce que tu veux" N° 8
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