"L'histoire de ma vie n'existe pas. ça n'existe pas. Il n'y a jamais de centre. Pas de chemin, pas de ligne. Il y a de vastes endroits où l'on fait croire qu'il y avait quelqu'un, ce n'est pas vrai il n'y avait personne."
Marguerite Duras l'Amant
« …Il y a une chose que je n'ai jamais dite. C'est quand, pour la première fois, j'ai vu la beauté que pouvait avoir une femme, ou encore : la beauté dont un corps et un visage de femme pouvait se charger. C'était en 1926. Ca s'est passé à Saïgon, à l'angle du boulevard Charner et de la rue Catinat. J'étais boulevard Charner. Une femme est arrivée dans l'autre sens, elle tournait rue Catinat. Ca a duré quelques secondes. Elle avait une robe noire, très fluide, très légère, comme en soie satinée. La jupe arrivait au genou, retenue aux hanches. Les corps était très élevé, athlétique, très mince. Les cheveux noirs étaient lisses, coupés à la garçonne. La robe et le corps étaient indissociables, un seul objet confondu, porté par la marche d'une élégance bouleversante, nouvelle. Le haut de la jupe était du même satin que la robe, mais faite de carrés alternés d'un grège terne, ingrat, et noir. La robe était très décolletée, sans manches. La femme portait des hauts talons. Elle n'avait aucun bijou. Elle était d'une beauté inoubliable. J'avais le sentiment d'avoir été brûlée par son passage. Je suis restée interdite. » Source : http://margueriteduras.perso.sfr.fr/L-amant.php
Qui n’a pas vu la route, à l’aube entre deux rangées d’arbres, toute fraîche, toute vivante, ne sait pas ce que c’est que l’espérance. L'espérance est une détermination héroïque de l'âme, et sa plus haute forme est le désespoir surmonté. L'espérance est une vertu héroïque. On croit qu'il est facile d'espérer. Mais n'espèrent que ceux qui ont eu le courage de désespérer des illusions et des mensonges où ils trouvaient une sécurité qu'ils prennent faussement pour de l'espérance. L'espérance est un risque à courir, c'est même le risque des risques. L'espérance est la plus grande et la plus difficile victoire qu'un homme puisse remporter sur son âme. On ne va jusqu'à l'espérance qu'à travers la vérité, au prix de grands efforts. Pour rencontrer l'espérance, il faut être allé au-delà du désespoir. Quand on va jusqu'au bout de la nuit, on rencontre une autre aurore. Le démon de notre cœur s'appelle « À quoi bon ! ». L'enfer, c'est de ne plus aimer. Les optimistes sont des imbéciles heureux, quant aux pessimistes, ce sont des imbéciles malheureux On ne saurait expliquer les êtres par leurs vices, mais au contraire par ce qu’ils ont gardé d’intact, de pur, par ce qui reste en eux de l’enfance, si profond qu’il faille chercher. Qui ne défend la liberté de penser que pour soi-même est déjà disposé à la trahir. Si l’homme ne pouvait se réaliser qu’en Dieu ? si l’opération délicate de l’amputer de sa part divine – ou du moins d’atrophier systématiquement cette part jusqu’à ce qu’elle tombe desséchée comme un organe où le sang ne circule plus – aboutissait à faire de lui un animal féroce ? ou pis peut-être, une bête à jamais domestiquée ? Il n’y a qu’un sûr moyen de connaître, c’est d’aimer. Le grand malheur de cette société moderne, sa malédiction, c’est qu’elle s’organise visiblement pour se passer d’espérance comme d’amour ; elle s’imagine y suppléer par la technique, elle attend que ses économistes et ses législateurs lui apportent la double formule d’une justice sans amour et d’une sécurité sans espérance. Georges Bernanos, conférence 1945
"L'histoire de ma vie n'existe pas. ça n'existe pas. Il n'y a jamais de centre. Pas de chemin, pas de ligne. Il y a de vastes endroits où l'on fait croire qu'il y avait quelqu'un, ce n'est pas vrai il n'y avait personne."
RépondreSupprimerMarguerite Duras l'Amant
« …Il y a une chose que je n'ai jamais dite. C'est quand, pour la première fois, j'ai vu la beauté que pouvait avoir une femme, ou encore : la beauté dont un corps et un visage de femme pouvait se charger. C'était en 1926. Ca s'est passé à Saïgon, à l'angle du boulevard Charner et de la rue Catinat. J'étais boulevard Charner. Une femme est arrivée dans l'autre sens, elle tournait rue Catinat. Ca a duré quelques secondes.
Elle avait une robe noire, très fluide, très légère, comme en soie satinée. La jupe arrivait au genou, retenue aux hanches. Les corps était très élevé, athlétique, très mince. Les cheveux noirs étaient lisses, coupés à la garçonne. La robe et le corps étaient indissociables, un seul objet confondu, porté par la marche d'une élégance bouleversante, nouvelle. Le haut de la jupe était du même satin que la robe, mais faite de carrés alternés d'un grège terne, ingrat, et noir. La robe était très décolletée, sans manches. La femme portait des hauts talons. Elle n'avait aucun bijou. Elle était d'une beauté inoubliable. J'avais le sentiment d'avoir été brûlée par son passage. Je suis restée interdite. »
Source : http://margueriteduras.perso.sfr.fr/L-amant.php
http://www.youtube.com/watch?v=mZl4wh3OGFg
http://www.youtube.com/watch?v=9sWXoxRN6j8
JAMES
Merci pour les extraits et les liens, James ! J'apprécie beaucoup !
SupprimerTes commentaires sont fabuleusement riches...
Qui n’a pas vu la route, à l’aube entre deux rangées d’arbres, toute fraîche, toute vivante, ne sait pas ce que c’est que l’espérance.
RépondreSupprimerL'espérance est une détermination héroïque de l'âme, et sa plus haute forme est le désespoir surmonté.
L'espérance est une vertu héroïque. On croit qu'il est facile d'espérer. Mais n'espèrent que ceux qui ont eu le courage de désespérer des illusions et des mensonges où ils trouvaient une sécurité qu'ils prennent faussement pour de l'espérance. L'espérance est un risque à courir, c'est même le risque des risques. L'espérance est la plus grande et la plus difficile victoire qu'un homme puisse remporter sur son âme.
On ne va jusqu'à l'espérance qu'à travers la vérité, au prix de grands efforts. Pour rencontrer l'espérance, il faut être allé au-delà du désespoir. Quand on va jusqu'au bout de la nuit, on rencontre une autre aurore.
Le démon de notre cœur s'appelle « À quoi bon ! ».
L'enfer, c'est de ne plus aimer.
Les optimistes sont des imbéciles heureux, quant aux pessimistes, ce sont des imbéciles malheureux
On ne saurait expliquer les êtres par leurs vices, mais au contraire par ce qu’ils ont gardé d’intact, de pur, par ce qui reste en eux de l’enfance, si profond qu’il faille chercher.
Qui ne défend la liberté de penser que pour soi-même est déjà disposé à la trahir.
Si l’homme ne pouvait se réaliser qu’en Dieu ? si l’opération délicate de l’amputer de sa part divine – ou du moins d’atrophier systématiquement cette part jusqu’à ce qu’elle tombe desséchée comme un organe où le sang ne circule plus – aboutissait à faire de lui un animal féroce ? ou pis peut-être, une bête à jamais domestiquée ?
Il n’y a qu’un sûr moyen de connaître, c’est d’aimer.
Le grand malheur de cette société moderne, sa malédiction, c’est qu’elle s’organise visiblement pour se passer d’espérance comme d’amour ; elle s’imagine y suppléer par la technique, elle attend que ses économistes et ses législateurs lui apportent la double formule d’une justice sans amour et d’une sécurité sans espérance.
Georges Bernanos, conférence 1945
Proposé par Yasmine :)
Intéressant, merci. J'y réfléchirai à tête reposée en prenant le temps de relire tranquillement... :-)
SupprimerBon week-end à toi, Chère Yasmine !